Eric Berne et nos besoins psychologiques

Eric Berne et nos besoins psychologiques

Eric Berne, créateur de l’analyse transactionnelle a lui aussi étudié cette notion de besoins psychologiques. Dans un article précédent, j’ai abordé la question des besoins psychologiques sous l’angle de la théorie de l’autodétermination (avec l’idée de la motivation intrinsèque et la motivation extrinsèque). Egalement la fameuse pyramide de Maslow (que ce dernier n’a d’ailleurs jamais décrit comme une pyramide hiérarchique). Dans cet article, je vous propose de regarder les approches d’Eric Berne. J’aborde sa vision sur nos besoins et je vous propose aussi un parallèle avec les états du moi. Fameux concept qu’il a mis en avant et qui structure notre manière d’être et d’agir.

 

Nos besoins selon Eric Berne

Quelques rappels sur l’analyse transactionnelle

Eric Berne (1910-1970) était un psychiatre et psychanalyste d’origine canadienne. Il est connu pour avoir conçu l’analyse transactionnelle (appelée aussi AT). L’analyse transactionnelle vise à comprendre les interactions humaines dans les relations entre deux personnes et dans des groupes. C’est une prise de conscience de ce qui se joue Ici et Maintenant. Elle permet d’analyser nos communications verbales et non verbales, les interactions humaines, les dynamiques relationnelles et nos modes de comportements. Ainsi, l’analyse transactionnelle permet d’améliorer la communication, les relations interpersonnelles et favorise le changement personnel. C’est en ce sens que je le considère comme une approche résolutoire.

En synthèse, l’analyse transactionnelle permet de :

• mieux se connaître,
• communiquer de manière plus optimale avec les autres
• mieux comprendre les groupes et vivre ensemble.

Eric Berne a introduit plusieurs concepts et notamment :

• les états du moi. La structuration de notre personnalité avec un côté Parent (parent normatif / parent nourricier), un côté Adulte et un côté Enfant (enfant libre / enfant rebelle / enfant libre)
• la notion de transaction. Ce qui se passe quand deux personnes communiquent
• les jeux psychologiques (notamment le triangle dramatique de Karpman).
• les positions de vie.
• la structuration du temps
• les signes de reconnaissance (Stroke en anglais)
• les messages contraignants (injonctions) : Sois parfait, Sois fort, Fais des efforts, Fais plaisir, Dépêche toi
• l’autonomie
• et les besoins vitaux

Voici une vidéo rare dans laquelle vous pouvez écouter Eric Berne parler de l’analyse transactionnelle et des relations humaines.

 

Nos besoins vitaux selon Eric Berne

Berne soutenait que la satisfaction des besoins vitaux était essentielle pour le bien-être psychologique et émotionnel des individus. Que nous en soyons conscient ou non, notre vie quotidienne, pour une bonne part, est orientée vers la satisfaction de ces besoins. Il en a identifié trois : le besoin de stimulation, besoin de reconnaissance, le besoin de structure.

Un point important qu’Eric Berne a toujours souligné : il n’y a aucune fatalité ! on peut prendre conscience de nos modes de fonctionnement à tout âge et les faire évoluer si on le souhaite.

Besoin de stimulation

Dès sa naissance, l’enfant reçoit de nombreuses stimulations de toutes sortes. Il est touché, nourri, caressé. Il sent les parfums, entend des sons, voit les lumières et les ombres. Le bébé goute le lait maternel ou autre. Il entre en contact avec le monde par ses cinq sens. Les sensations fortes, devenues perceptions, vont accompagner son évolution et son développement tout au long de sa vie.

Le besoin de stimulation fait référence à la recherche d’excitation, de nouveauté et de variété dans nos expériences et activités. Nous avons un besoin de variété, de nouveauté. Cela peut inclure l’exploration de nouveaux endroits, l’apprentissage de nouvelles compétences, l’expérience de nouvelles activités.

Il est souvent alimenté par notre curiosité naturelle, notre désir « d’explorer le monde qui nous entoure« . Nul besoin d’aller très loin pour cela ! Par contre, pour certains, cela peut être synonyme de sensations fortes, d’expériences excitantes.

Ce besoin est très lié à l’état du moi Enfant avec les aspects d’exploration, de curiosité, de jeu, créativité, réactions émotionnelles intenses, la recherche de sensation forte.

La satisfaction du besoin de stimulation est importante pour maintenir notre intérêt, notre engagement et notre bien-être. Lorsque nous sommes exposés à des niveaux appropriés de stimulation, nous nous sentons plus vivants, alertes et motivés. Cependant, un manque ou un excès de stimulation peut entraîner des sentiments d’ennui, de frustration ou de surcharge, de stress, d’épuisement.

Besoin de reconnaissance

Le besoin de reconnaissance correspond au désir inné de se sentir apprécié, valorisé et respecté par les autres. C’est cette envie d’être accepté et reconnu par les autres, comme étant un être humain singulier, spécifique, mais aussi semblable aux autres. Il implique la recherche de validation sociale et d’approbation pour nos actions, nos compétences et notre contribution à la société. Ce besoin de reconnaissance peut provenir de différentes sources, notamment des membres de la famille, des amis, des collègues de travail ou de la société en général. On comprend donc que nos besoins de reconnaissance sont influencés par ceux que nous avons vécus. Par exemple, si vous avez été élevés dans un environnement où la reconnaissance était abondante et ouverte, vous serez probablement plus susceptibles de rechercher et de donner activement de la reconnaissance.

Ainsi, Berne a introduit le concept de « strokes« , traduit souvent en français par « signe de reconnaissance ». Ces strokes représentent les interactions sociales positives ou négatives, telles que l’attention, l’affection, la validation ou la critique, que les individus reçoivent ou donnent au cours de leurs échanges quotidiens.

Signe de reconnaissance

Un signe de reconnaissance (stroke en anglais) peut être :

• verbal (comme des compliments, des encouragements, des critiques) ou non verbal (comme des gestes, des regards, des sourires)
• positif ou négatif : un compliment ou une critique négative
• implicite ou explicite
• conditionnel ou inconditionnel. Le premier est factuel, précis et circonstancié. Il concerne le « faire » : « ton rapport est excellent » ou « ton gâteau n’est pas une réussite ». Le second est relatif à « l’être » de la personne dans sa globalité : « je t’aime » , ou « je ne peux pas le voir »

Le besoin de reconnaissance est fondamental pour le bien-être émotionnel et psychologique. Les strokes positifs nourrissent l’estime de soi, renforcent le sentiment de valeur personnelle, de confiance en soi. Ils contribuent à un sentiment de connexion d’appartenance, d’engagement. A l’inverse les strokes négatifs entrainent un sentiment de dévalorisation, de l’insatisfaction, du découragement. Mais le pire est l’absence de signe de reconnaissance ! En effet, dans ce cas, on a l’impression de ne plus exister au regard des autres, d’être transparent. Les conséquences sont néfastes sur la santé mentale et émotionnelle. Elles conduisent à des problèmes tels que la dépression, l’anxiété, ou une dégradation profonde de l’estime de soi.

Besoin de structure

C’est notre désir fondamental de trouver un sens, une organisation. De comprendre les règles, les attentes sociales et d’avoir un cadre clair pour naviguer dans notre vie quotidienne. Un premier aspect du besoin de structure est notre souhait (plus ou moins fort selon les personnes) d’avoir une organisation de vie avec des horaires, des repères, des règles. Tout ce qui permet d’avoir un cadre stable, prévisible et qui permet de réduire le stress associé à l’imprévisibilité. Une forme de contrôle de notre vie. Et aussi de se sentir en mesure de faire face aux défis et aux imprévus.

Le besoin de structure se manifeste aussi par notre besoin de clarté quant aux attentes et aux responsabilités qui nous incombent. Que ce soit dans notre vie personnelle ou notre vie professionnelle (exemple, nos responsabilités). Avoir une structure claire permet de savoir ce qui est attendu et de se sentir plus compétents dans note rôle. L’élément sous-jacent est d’avoir des limites claires (ce qui est acceptable ou non) et de cadres définis. Cela structure nos interactions sociales, nos relations personnelles et professionnelles. Il fournit également un sens, de la signification dans la vie (exemple : nos objectifs personnels, nos valeurs, croyances, principes)

Bien que le besoin de structure implique un désir d’ordre et de stabilité, il est également important de reconnaître la nécessité d’adaptabilité et de flexibilité. Il est important d’être capable de s’adapter aux changements et aux défis de la vie tout en maintenant un sens de structure et de contrôle.

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Etats du moi et expression de nos besoins

Comme expliqué dans un précédent article, Eric Berne distingue trois États du Moi : Parent, Adulte, Enfant. Ils structurent notre personnalité à chaque instant de la journée et ils ont une utilité propre. Il me semble intéressant de vous partager mon point de vue sur la manière dont s’exprime nos besoins en fonction de l’état du moi dans lequel nous nous trouvons.

 

Comment s’exprime nos besoins dans l’Etat du moi Parent

L’état du moi Parent recouvre à la fois la partie de nous qui fixe les limites, donne des ordres, qui est attaché aux valeurs et aux règles (le parent normatif). C’est aussi la facette de notre personnalité qui rassure, encourage, soutien, qui est bienveillant (le parent nourricier).

Le besoin de stimulation peut se manifester à travers des activités en lien avec les valeurs personnelles, l’engagement personnel. Egalement l’idée de transmettre des savoirs, des expériences. De développer l’apprentissage à travers des activités éducatives. Le besoin de stimulation peut se manifester par des comportements de leadership, de prise d’initiatives, le désir d’influencer.

Dans l’état du moi Parent, les personnes peuvent exprimer le besoin de reconnaissance en donnant des « strokes » positifs aux autres. Par exemple, des compliments, des encouragements, des félicitations et des marques d’appréciation. Mais également des signes de reconnaissance négatif comme la critique systématique, la désapprobation régulière (cela peut provenir de modèles parentaux qui sur valorisent la perfection ou la conformité). Enfin, il peut parfois conduire à des comportements de comparaison ou de compétition avec les autres.

En monde Parent, les personnes sont susceptibles de refléter les modèles parentaux de structure qu’ils ont observés pendant leur enfance. Par exemple, s’ils ont grandi dans un environnement où l’ordre, la discipline et les routines étaient valorisés, ils sont susceptibles d’adopter des attitudes similaires envers la structure dans leur propre vie. Le besoin de structure peut également se manifester par la recherche de stabilité et de prévisibilité dans la vie quotidienne.

 

Le mode Adulte et l’expression de mes besoins

Selon Eric Berne, l’état du moi Adulte représente la partie de notre personnalité qui est centrée sur :

• la pensée rationnelle (pas / peu influencée par des émotions excessives, des préjugés),
• la prise de décision éclairée soutenue par une analyse logique et objective des situations
• une communication objective (claire, directe, efficace et constructive).

Le besoin de stimulation s’exprime à travers l’état du moi Adulte en encourageant la recherche de nouvelles connaissances. Une forme d’exploration intellectuelle mettant à l’épreuve nos compétences, nos capacités. Il est motivé par la curiosité, le désir de découvrir de nouvelles choses. Il se manifeste aussi par des activités qui stimulent la pensée critique et la prise de décision éclairée.

Le besoin de reconnaissance peut se manifester de manière plus subtile à mon sens car moins émotionnel que les états du moi Parent ou Enfant. Par exemple, par le fait d’être reconnu pour nos compétences, nos réalisations, notre expertise. Mais aussi être apprécié pour nos contributions, notre implication, nos efforts (à faire ou à progresser). En état du moi Adulte, les personnes cherchent à être reconnus pour leur pensée critique et leurs contributions intellectuelles dans les échanges.

A travers l’état du moi Adulte, le besoin de structure se matérialise par la recherche de planification, d’organisation et de gestion efficace des responsabilités, des activités. C’est clairement la partie de nous qui élabore des plans, des stratégies pour atteindre des objectifs. Tout ce qui est routines, habitudes (que ce soit dans la vie quotidienne ou dans le milieu professionnel avec par exemple les procédures, les process).

 

Expression des besoins et Etat du moi Enfant

Nous avons tous été un petit enfant ! Pour Eric Berne, la part d’enfant en nous, c’est l’endroit du rêve, des émotions, des peurs, des sentiments, de la spontanéité. Par moment, nous pensons, agissons, réagissons exactement de la même façon.

En mode Enfant, le besoin de stimulation s’exprime par exemple dans la recherche d’expériences nouvelles mêlant plaisirs et excitations (activités à sensations fortes). Le besoin de ressenti émotionnel de joie, de bonheur, d’enthousiasme dans la vie quotidienne. C’est donc la part de nous qui veut découvrir, explorer un large éventail d’émotions, de sensations. C’est aussi l’envie de s’engager dans des activités ludiques, créatives qui nourrissent l’imagination. Enfin, il peut se manifester par le désir de créer des liens et des interactions sociales significatives.

Notre besoin de reconnaissance peut prendre plusieurs formes d’expression. Tout d’abord reconnaissance de nos réalisations, de nos succès. Le besoin d’encouragement. Tout particulièrement pour des actions difficiles, pour les choix que nous faisons. Ainsi nous recherchons des signes d’attention, de compréhension, de soutien émotionnel. C’est la part de nous qui cherche à établir des relations authentiques. Nous nous sentons reconnus, appréciés et aimés pour ce que nous sommes. On comprend aisément que cela contribue fortement à renforcer l’estime de soi, la confiance en soi, le bien-être émotionnel.

Le besoin de structure se manifeste par désir de sécurité, de stabilité et de cadre. Tout d’abord, cela peut porter sur la consistance et la routine dans la vie quotidienne. Il est en lien avec le désir de limites claires, de règles définies, de cadre (j’aime savoir ce que l’on attend de moi). Mais également par le soutien dans la compréhension du « monde » et les prises de décisions. Enfin, cela peut aussi être une forme de sécurité émotionnelle : des personnes sur qui compter, des relations stables, prévisibles.

 

 

Pour en savoir plus sur les besoins psychologiques d’Eric Berne

Dans un prochain article, j’aborderai d’autres formes de besoins psychologiques. Notamment ceux explicités par Eric Berne, Carl Rogers et Will Schutz.

N’hésitez pas à me contacter ou à me laisser des commentaires en bas de page. Ce sera avec plaisir que j’y répondrai. Merci pour vos apports.